161.3

 

 

24

mai

2023

 

Loi
sur la médiation civile et pénale (LMCP)

(*)

 

 

État au
1er janvier 2025

Le Grand conseil de la République et Canton de Neuchâtel,

vu le code civil suisse (CC), du 10 décembre 1907[1] ;  

vu le code de procédure civile (CPC), du 19 décembre 2008[2] ;

vu le code de procédure pénale suisse (CPP), du 5 octobre 2007[3] ;

vu la loi fédérale sur la procédure pénale applicable aux mineurs (PPMin), du 20 mars 2009[4] ;

vu la loi concernant l’introduction du code civil suisse (LI-CC), du 22 mars 1910[5] ;

sur la proposition de la commission législative du 23 mars 2023,

décrète :

 

CHAPITRE premier

Dispositions générales

Buts

Article premier   La présente loi a pour buts de :

a)  donner un cadre à la mise en œuvre de la médiation dans les procédures judiciaires civiles et pénales ;

b)  promouvoir le recours à la médiation ;  

c)  favoriser l’accès à la médiation.

 

Champ d’application

Art. 2   La présente loi s’applique aux médiations effectuées dans le cadre de procédures judiciaires dans les domaines civil et pénal, y compris les procédures pénales des mineurs.

 

Définition

Art. 3   La médiation est un processus formel de la gestion de la communication, en principe librement consenti par les parties, soutenu par une médiatrice ou un médiateur indépendant, neutre et impartial, au travers duquel les parties recherchent leur propre solution.

 

CHAPITRE 2

Devoirs des médiatrices et médiateurs

Indépendance

Art. 4   1La médiatrice ou le médiateur exerce ses fonctions en toute indépendance, en particulier face à l’autorité saisie de la cause.

2L’activité de médiation est placée sous la responsabilité de la personne qui l’exerce.

3Les médiatrices et médiateurs sont soumis aux règles de récusation de la procédure applicable.

 

Impartialité et neutralité

Art. 5   1La médiatrice ou le médiateur ne favorise aucune des parties au litige.

2Aucune pression ne doit être exercée sur les parties, notamment pour obtenir l’adhésion à un accord.

 

Confidentialité

Art. 6   La médiatrice ou le médiateur est tenu de garder la confidentialité sur les faits dont elle ou il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, à moins que d’autres textes n’en disposent autrement ou que toutes les parties aient donné leur accord.

 

CHAPITRE 3

Médiatrices et médiateurs inscrits aux tableaux

Tenue des tableaux

Art. 7   1Le service désigné par le Conseil d’État tient à jour un tableau par domaine des personnes qui respectent les conditions d’inscription et qui ont demandé à y figurer.  

2Ces tableaux peuvent mentionner notamment les qualifications particulières et les domaines de spécialité des médiatrices et médiateurs qui y figurent.

3La médiatrice ou le médiateur qui ne remplit plus les conditions d’inscription doit être radié du tableau concerné par le département désigné par le Conseil d’État (ci-après : le département). Il en va de même en cas de décès ou d’incapacité durable.

4L’inscription aux tableaux est soumise à émolument.

5En cas de refus d’inscription ou de radiation (à part en cas de décès, de départ ou de cessation d’activité), le département rend une décision.

6Seuls les honoraires des médiatrices et médiateurs inscrits au tableau peuvent être pris en charge par l’État.

 

Conditions d’inscription

Art. 8   1Les médiatrices et médiateurs doivent remplir les conditions suivantes pour être inscrits à un ou plusieurs tableaux :  

a)  disposer d’une expérience d’au moins deux ans dans le domaine de la gestion des conflits ;

b)  disposer d’une formation suffisante en matière de médiation ;

c)  ne pas faire l’objet d’une inscription au casier judiciaire pour une infraction incompatible avec l’exercice de son activité.

2Le Conseil d’État complète et précise les conditions précitées. Il peut prévoir des conditions supplémentaires en fonction du domaine concerné.

 

Sanctions disciplinaires

Art. 9   1En cas de manquement aux dispositions de la présente loi, la médiatrice ou le médiateur inscrit à un ou plusieurs tableaux peut faire l’objet d’une sanction disciplinaire prononcée par le département, après avoir entendu la personne concernée.

2Selon la gravité du manquement, la sanction peut consister en :

a)  un avertissement ;

b)  la radiation provisoire d’un ou des tableaux ;

c)  la radiation définitive d’un ou des tableaux.

 

Prescription

Art. 10   1La poursuite disciplinaire se prescrit par un an à compter du jour où le département a eu connaissance des faits incriminés, et dans tous les cas par cinq ans dès le jour où ils ont été commis.

2Si les faits incriminés constituent un acte punissable pénalement, la prescription plus longue prévue par le droit pénal s’applique.

3Le délai de prescription est interrompu par tout acte d’instruction du département.

4Le délai est suspendu durant une procédure pénale.

 

CHAPITRE 4

Voies de droit

Voies de droit

Art. 11   Les décisions du département rendues sur la base des chapitres 2 et 3 de la présente loi peuvent faire l’objet d’un recours au Tribunal cantonal dans les 30 jours, en application de la loi sur la procédure et la juridiction administratives (LPJA), du 27 juin 1979[6].

 

CHAPITRE 5

Médiation en procédure civile

Principe

Art. 12   La médiation en procédure civile est régie par le code de procédure civile (CPC), du 19 décembre 2008.

 

Frais de la médiation

Art. 13   1Les frais de la médiation sont fixés d’entente entre les parties et la médiatrice ou le médiateur.

2Ils sont à la charge des parties, qui conviennent de leur répartition entre elles.  

 

Assistance judiciaire

Art. 14   1Les frais de médiation de la partie qui a obtenu l’assistance judiciaire pour la procédure concernée sont avancés par l’État si le tribunal recommande la médiation ou donne son accord à une médiation demandée par les parties, dans les limites prévues par la loi sur l’assistance judiciaire (LAJ), du 28 mai 2019[7].

2Le tarif horaire de médiation pris en charge par l’assistance judiciaire ainsi que la procédure en la matière sont fixés dans la LAJ.

3Les frais de médiation pris en charge par l’assistance judiciaire sont remboursables, selon les modalités prévues par la LAJ.

 

Affaires concernant les enfants

Art. 15   1Dans les affaires concernant le droit des enfants, les cinq premières heures de médiation sont prises en charge par l’État, si le tribunal la recommande ou donne son accord à une médiation demandée par les parties, et ne sont pas remboursables.

2Dès la sixième heure, les frais sont pris en charge par l’État uniquement si les conditions de la gratuité sont réunies conformément à l’article 218, alinéa 2, CPC. Ces frais sont remboursables.

3L’autorité compétente précise dans sa décision sur les frais de médiation, pour chaque partie, quelle somme prise en charge par l’État est remboursable.

4Les dispositions de la LAJ relatives à la désignation des médiatrices et médiateurs, à leur rémunération, au remboursement des prestations prises en charge par l’État et aux voies de droit contre les décisions de l’autorité compétente s’appliquent par analogie aux personnes ne bénéficiant pas de l’assistance judiciaire.

 

CHAPITRE 6

Médiation en procédure pénale des mineurs

Principe

Art. 16   La médiation en procédure pénale des mineurs est réglée par la Loi fédérale sur la procédure pénale applicable aux mineurs (PPMin), du 20 mars 2009.

 

Procédure et rémunération

Art. 17   1Les conditions de mise en œuvre de la médiation en droit pénal des mineurs, notamment la procédure ainsi que la rémunération des médiatrices et médiateurs, sont réglées par le Conseil d’État.

2L’autorité d’instruction et les tribunaux ne peuvent désigner que des médiatrices ou médiateurs inscrits au tableau.

 

Gratuité

Art. 18   Les frais de la médiation sont pris en charge par l’État et ne sont pas remboursables.

 

CHAPITRE 7

Médiation en procédure pénale des adultes

Principe

Art. 19   1La direction de la procédure peut proposer aux parties d’entrer dans un processus de médiation à n’importe quel stade de la procédure.  

2Toute médiation pénale nécessite l’accord des parties et de la direction de la procédure, ainsi que du ministère public lorsque les infractions se poursuivent d’office.

3Le Conseil d’État précise, si besoin, les modalités de la mise en œuvre de la médiation.

 

Frais

Art. 20   1Sauf disposition contraire du droit fédéral ou du droit cantonal, les frais de médiation sont à la charge des parties.

2Ils sont fixés d’entente entre les parties et la médiatrice ou le médiateur.  

3Le Conseil d’État peut prévoir dans quels cas et à quelles conditions les frais de médiation peuvent être mis à la charge de l’État.  

 

CHAPITRE 8

Promotion de la médiation

Promotion de la médiation

Art. 21   1L’État promeut la médiation comme mode de résolution des conflits.

2En particulier, il encourage les autorités judiciaires et les associations professionnelles des avocat-e-s à sensibiliser leurs membres à la médiation et à mettre à leur disposition les outils adéquats.  

 

CHAPITRE 9

Disposition pénale

Sanctions

Art. 22   1Toute personne qui, intentionnellement, aura fait, oralement ou par écrit, une déclaration inexacte ou incomplète en vue d’obtenir ou de maintenir une prestation basée sur la présente loi, ou de faire obtenir à une tierce personne une telle prestation, sera punie de l’amende.

2La personne bénéficiaire qui, intentionnellement, aura omis de communiquer une modification des faits sur lesquels repose la décision d’octroi de la prestation basée sur la présente loi, ou la survenance de tout autre fait relatif aux conditions d’octroi de cette prestation, sera punie de l’amende.

 

CHAPITRE 10

Disposition transitoire et dispositions finales

Dispositions d’exécution

Art. 23   Le Conseil d’État arrête les dispositions d’exécution nécessaires.

 

Modification du droit en vigueur

Art. 24   La modification du droit en vigueur est réglée dans l’annexe de la présente loi.

 

Disposition transitoire

Art. 25   La présente loi s’applique aux procédures judiciaires pendantes à son entrée en vigueur.

 

Référendum facultatif

Art. 26   La présente loi est soumise au référendum facultatif.

 

Promulgation et entrée en vigueur

Art. 27   1Le Conseil d’État fixe la date d’entrée en vigueur de la présente loi.

2Il pourvoit, s’il y a lieu, à sa promulgation et à son exécution.

 

 

Loi promulguée par le Conseil d’État le 25 septembre 2024.

L’entrée en vigueur est fixée avec effet au 1er janvier 2025.

 

 

 

Annexe 1

 

1.  La loi d’introduction de la Loi fédérale sur la procédure pénale applicable aux mineurs (LI-PPMin), du 2 novembre 2010, est modifiée comme suit :

 

Art. 12

Abrogé

 

2.  La loi sur l’assistance judiciaire (LAJ), du 28 mai 2019, est modifiée comme suit :  

 

Article premier, al. 3 (nouvelle teneur)

3Dans les cas visés par les articles 213 et 214 CPC, elle comprend aussi le recours à une médiatrice ou à un médiateur inscrit au tableau selon l’article 20a, si le tribunal recommande le recours à la médiation ou donne son accord à une médiation demandée par les parties.

 

Art. 5, al. 1, let. d (nouvelle)

d)  le recours à une médiatrice ou à un médiateur, dans les cas énoncés à l’article premier, alinéa 3.

 

Art. 6, al. 1 (nouvelle teneur)

1Les décisions concernant l’octroi, le refus ou le retrait de l’assistance judiciaire, de même que la désignation d’un-e avocat-e, d’une médiatrice ou d’un médiateur, sa révocation et son remplacement sont du ressort de l’autorité saisie de la cause, ou que la personne requérante se propose de saisir.

 

Titre précédant l’article 16

CHAPITRE 3 (nouvelle teneur)

Avocat-e, médiatrice et médiateur

Titre précédant l’article 16 (nouvelle teneur)

Section 1 : Avocat-e

Titre précédant l’article 19

Abrogé

 

Art. 19, note marginale (nouvelle teneur)

Exécution du mandat

 

 

Titre précédant l’article 20a (nouveau)

Section 2 : Médiatrice et médiateur

 

Art. 20a (nouveau)

Désignation et modalités

1Les parties choisissent la médiatrice ou le médiateur parmi les noms inscrits au tableau prévu par la loi sur la médiation civile et pénale (LMCP), du 24 mai 2023.

2Sauf exception dûment motivée, il ne peut y avoir de changement de médiatrice ou médiateur en cours de médiation.

3Lorsqu’elle désigne la médiatrice ou le médiateur choisi par les parties, l’autorité en charge de la procédure fixe le nombre maximal d’heures de médiation qui seront prises en charge dans le cadre de l’assistance judiciaire. Ce nombre, qui ne peut dans un premier temps excéder 8 heures, peut être augmenté en cours de médiation par décision de l’autorité en charge de la procédure, sur demande motivée de la médiatrice ou du médiateur et avec l’accord des parties. Cette limite n’est pas applicable aux cas prévus à l’article 218, alinéa 2, CPC.

4Une co-médiation peut exceptionnellement être mise en place.

 

Art. 22, al. 1 (nouvelle teneur) et al. 3 (nouveau)

1L’indemnité due est calculée selon le tarif horaire suivant, TVA non comprise :

a)  avocat-e : 180 francs ;

b)  mandataire professionnellement qualifié-e et médiatrice ou médiateur : 140 francs ;

c)  avocat-e stagiaire : 110 francs.

3Pour les médiatrices et les médiateurs, le nombre d’heures retenu ne peut en principe pas dépasser celui autorisé par l’autorité compétente selon l’article 20a, alinéa 3.  

 

Art. 25 (nouvelle teneur)

À la fin de la procédure, l’avocat-e, la médiatrice ou le médiateur remet à l’autorité compétente le décompte des frais et honoraires donnant lieu à indemnisation, avec indication du temps consacré. À défaut, il est statué d’office.

 

Art. 25a (nouveau)

Mémoire de médiation

1Si les parties ne conviennent pas d’une répartition à parts égales des honoraires et frais de médiation, et que seule l’une d’elles bénéficie de l’assistance judiciaire, la part prise en charge par l’État ne peut excéder sa quote-part calculée sur une base égalitaire. À cet effet, la médiatrice ou le médiateur précise sur son décompte la répartition convenue par les parties.  

2Seule la part afférente à la partie ou aux parties bénéficiaires de l’assistance judiciaire fait l’objet du mémoire remis à l’autorité compétente. Cette dernière précise dans sa décision le montant que chaque partie devra rembourser, en tenant compte de l’article 15, alinéa 1, LMCP, dans les affaires concernant le droit des enfants.  

3La part de la partie non bénéficiaire de l’assistance judiciaire lui est donc facturée directement par la médiatrice ou le médiateur.

Art. 27 (nouvelle teneur)

La créance de l’avocat-e, de la médiatrice ou du médiateur envers l’État se prescrit par cinq ans à compter de la fin du procès.

 

Art. 32, al. 1 (nouvelle teneur)

1La personne bénéficiaire de l’assistance judiciaire est tenue de rembourser les frais occasionnés par l’assistance judiciaire à l’État aussitôt que ses moyens financiers le lui permettent. L’article 15, alinéa 1, LMCP est réservé.

 

Art. 35, al. 1 (nouvelle teneur)

1À la fin de l’instance, le département examine si la personne bénéficiaire de l’assistance judiciaire est en mesure de rembourser les frais pris en charge par l’État.

 

Art. 38 (nouvelle teneur)

Les décisions de l’autorité compétente de première instance concernant l’octroi, le refus ou le retrait de l’assistance judiciaire, de même que la désignation d’un-e avocat-e, d’une médiatrice ou d’un médiateur, sa révocation, son remplacement et son indemnisation, ou la fixation du nombre maximal d’heures de médiation prises en charge, peuvent faire l’objet d’un recours auprès de la Cour civile du Tribunal cantonal.

 

 

 

 



(*) FO 2023 No 23

 

[1]     RS 210

[2]     RS 272

[3]     RS 312.0

[4]     RS 312.1

[5]     RSN 211.1

[6]     RSN 152.130

[7]     RSN 161.2