161.3

 

 

27

juin

2006

 

Loi
sur l’assistance pénale, civile et administrative (LAPCA)

(*)

 

 

 

Le Grand Conseil de la République et Canton de Neuchâtel,

vu l'article 28, alinéa 3, de la Constitution de la République et Canton de Neuchâtel, du 24 septembre 20001);

considérant que les termes désignant des personnes s'appliquent indifféremment aux femmes et aux hommes;

sur la proposition du Conseil d'Etat, des 19 avril et 6 juin 2006,

décrète:

 

 

CHAPITRE PREMIER

Dispositions générales

But

Article premier   1La présente loi a pour but de garantir aux personnes physiques dont les ressources sont insuffisantes la défense de leurs droits devant les autorités judiciaires et administratives. 

2Elle définit les conditions de l'assistance pénale, civile et administrative (ci-après: l'assistance).

 

Champ d'application

Art. 2   1La loi s'applique aux causes pénales, civiles et administratives instruites par les autorités judiciaires ou administratives du canton.

2Les dispositions du droit fédéral sur l'assistance sont réservées.

 

Autorités d'application

Art. 3   1Le Conseil d'Etat arrête les dispositions nécessaires à l'exécution et à l'application uniforme de la présente loi. 

2Il désigne le département compétent à cet effet.

 

Droit à l'assistance

1. Indigence

Art. 4   1L'assistance est accordée au requérant qui ne peut pas assumer les frais liés à la défense de ses droits sans porter atteinte au minimum nécessaire à son entretien et celui de sa famille.

2Elle est subsidiaire aux obligations du droit civil.

 

2. Chances de succès

Art. 5   1En matière civile, y compris l'action civile devant le juge pénal, et en matière administrative, ainsi qu'en procédure de recours, l'octroi de l'assistance exige en outre que la cause n'apparaisse pas d'emblée dénuée de chances de succès.

2Il en est de même, en matière pénale, pour le lésé lors d'une enquête préalable confiée au juge d'instruction et pour le plaignant.

 

3. Abus de procédure

Art. 6   Dans tous les cas, l'assistance est refusée si la cause apparaît d'emblée procédurière ou à tout autre égard abusive.

 

Effets de l'assistance

Art. 7   1L'assistance a pour effet de dispenser le bénéficiaire d'avancer ou de garantir des frais de procédure, et de fournir des sûretés.

2Sur demande du bénéficiaire, elle comprend en cas de nécessité la désignation d'un avocat chargé du mandat d'assistance, dont la rémunération est avancée par l'Etat.

 

Nécessité d'un avocat

Art. 8   1Devant le tribunal de police, il n'y a désignation d'un avocat que si le ministère public requiert contre le prévenu une peine privative de liberté ou si la cause présente pour lui des difficultés particulières.

2Pour le lésé lors d'une enquête préalable confiée au juge d'instruction et pour le plaignant en matière pénale, la désignation d'un avocat exige que le bénéficiaire ne soit pas en mesure d'assumer seul la défense de ses intérêts. 

3Il en est de même en matière civile, y compris l'action civile devant le juge pénal, en matière administrative, ainsi qu'en procédure de recours.

 

Devoir d'information

Art. 9   1L'autorité saisie informe la personne de son droit à l'assistance et des obligations de remboursement qui en découlent.

2Les avocats en informent leurs clients.

 

CHAPITRE 2

Procédure d'octroi

Moment de la requête

Art. 10   L'assistance peut être requise avant l'introduction de l'instance, ou en tout état de cause.

 

Forme de la requête

Art. 11   1La requête d'assistance est adressée par écrit à l'autorité saisie, ou que le requérant se propose de saisir.

2Elle doit être sommairement motivée.

 

Instruction

Art. 12   L'autorité saisie procède aux investigations nécessaires et requiert les renseignements et les pièces utiles.

 

Obligation de collaborer

Art. 13   1Le requérant est tenu de fournir les renseignements et les pièces requises.

2A défaut, la requête est rejetée.

 

Décision

Art. 14   1L'autorité saisie statue sur la requête d'assistance.

2Si l'autorité est formée d'un collège, la décision est prise par son président, ou par le membre qu'il désigne à cet effet.

3La décision est communiquée au requérant et, cas échéant, à l'avocat chargé du mandat d'assistance, ainsi qu'au département. 

4Elle est sommairement motivée.

 

Assistance à titre provisoire

Art. 15   1En cas d'urgence, l'autorité saisie octroie, sur demande, l'assistance à titre provisoire, avant instruction de la requête.

2Le rejet de la requête d'assistance n'a pas d'effet rétroactif.

3Il n'y a pas lieu à assistance à titre provisoire en procédure de recours.

 

Information subséquente

Art. 16   Le bénéficiaire de l'assistance est tenu de communiquer immédiatement à l'autorité saisie toute modification des faits sur lesquels repose la décision d'octroi de l'assistance, ainsi que la survenance de tout autre fait relatif aux conditions d'octroi de l'assistance.

 

Frais de la procédure

Art. 17   1La procédure tendant à l'octroi de l'assistance est gratuite.

2En cas de requête manifestement infondée, procédurière ou à tout autre égard abusive, l'autorité saisie peut toutefois en mettre les frais à la charge du requérant.

 

Réexamen

Art. 18   1L'autorité saisie peut procéder au réexamen des conditions d'octroi de l'assistance.

2Les dispositions sur l'instruction des requêtes d'assistance s'appliquent par analogie.

 

Durée de l'assistance

Art. 19   1L'assistance prend effet le jour où elle a été requise et se termine, sauf retrait, à la fin de la procédure cantonale de recours.

2L'autorité saisie peut accorder l'assistance avec effet rétroactif si les circonstances particulières de la cause le justifient.

 

Retrait de l'assistance

1. En général

Art. 20   1L'autorité saisie retire l'assistance lorsqu'elle constate que le bénéficiaire n'y a plus droit ou que l'assistance a été accordée à tort.

2Elle communique sa décision au département.

3Si l'autorité est formée d'un collège, la décision est prise par son président, ou par le membre qu'il désigne à cet effet.

4Le retrait n'a pas d'effet rétroactif.

 

2. Procédure de recours

Art. 21   1L'autorité de recours retire l'assistance pour l'ensemble de la procédure de recours lorsqu'il apparaît que le recours était d'emblée dénué de chances de succès. 

2Le rejet du recours ne signifie pas nécessairement qu'il était d'emblée dénué de chances de succès.

 

CHAPITRE 3

Mandat d'assistance

Attribution

Art. 22   1Le mandat d'assistance est confié à un avocat inscrit à un registre cantonal des avocats.

2L'autorité saisie nomme l'avocat auquel est confié le mandat d'assistance. 

 

Obligation d'accepter le mandat

Art. 23   L'avocat inscrit au rôle officiel du barreau neuchâtelois est tenu d'accepter le mandat d'assistance, à moins qu'il ne puisse invoquer de justes motifs de refus.

 

Devoirs

Art. 24   1L'avocat ne peut demander au bénéficiaire de l'assistance, ni accepter de lui une prestation quelconque en sus de sa rémunération légale.

2Il limite son activité à ce qui est nécessaire à la défense des intérêts qui lui sont confiés, en tenant compte de la nature, de l'importance et de la difficulté de la cause ainsi que de la responsabilité qu'il est appelé à assumer. 

 

Responsabilité civile

1. Principe

Art. 25   1L'avocat est civilement responsable de tout dommage qu'il cause dans l'exercice du mandat d'assistance, intentionnellement ou par négligence.

2La responsabilité civile de l'avocat est soumise aux dispositions du code des obligations.

3Les tribunaux civils sont compétents.

 

2. Exclusion

Art. 26   L'Etat ne répond pas des conséquences civiles des fautes commises par l'avocat.

 

CHAPITRE 4

Frais et dépens

Fixation

Art. 27   1L'autorité judiciaire ou administrative qui statue sur la cause fixe les frais et les dépens et les répartit conformément au droit de procédure applicable en la matière. 

2L'autorité judiciaire ou administrative communique au département le dispositif de son jugement ou de sa décision.

 

Sort pour le bénéficiaire

1. Perte du procès

Art. 28   Le bénéficiaire de l'assistance condamné à rembourser à l'adverse partie les frais avancés par elle et à lui verser des dépens s'en acquitte lui-même.

 

2. Gain du procès

Art. 29   1Lorsqu'elle est condamnée à supporter les frais, la partie adverse paie à l'Etat les frais que ce dernier a avancés pour le bénéficiaire.

2Lorsque des dépens ont été alloués au bénéficiaire de l'assistance, la partie qui les doit s'en acquitte en main de l'Etat jusqu'à concurrence de la rémunération accordée à l'avocat chargé du mandat d'assistance. Le surplus est dû à l'avocat personnellement.

3Le bénéficiaire reste débiteur envers l'Etat des sommes que ce dernier ne peut recouvrer auprès de la partie condamnée à supporter les frais et à verser des dépens. Son paiement le subroge aux droits de l'Etat.

 

Titre exécutoire

Art. 30   Le dispositif du jugement ou de la décision, dûment attesté, vaut titre exécutoire en faveur de l'Etat, au sens de l'article 80 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP), du 11 avril 18892).

 

chapitre 5

Rémunération de l'avocat

Principe

Art. 31   1L'avocat a droit à une rémunération selon le tarif arrêté par le Conseil d'Etat. 

2Il a droit au remboursement de ses débours.

 

Procédure

1. Informations complémentaires

Art. 32   1A la fin de l'instance, l'autorité saisie requiert de l'avocat tous renseignements complémentaires utiles à la fixation de sa rémunération, portant notamment sur les opérations donnant lieu à rémunération, avec l'indication du temps qui leur a été consacré, ainsi que sur les débours dont le remboursement est réclamé. 

2Elle l'informe qu'à défaut, elle statuera au vu du dossier de la cause.

 

2. Observations

Art. 33   L'autorité saisie donne connaissance au bénéficiaire et au département des éléments permettant de fixer la rémunération de l'avocat, en leur impartissant un délai pour faire part de leurs éventuelles observations. 

 

3. Décision

Art. 34   1L'autorité saisie fixe la rémunération de l'avocat dans une décision sommairement motivée.

2Si l'autorité est formée d'un collège, la décision est prise par son président, ou par le membre qu'il désigne à cet effet.

3La décision est notifiée à l'avocat et au bénéficiaire, ainsi qu'au département.

 

4. Frais de la procédure

Art. 35   1La procédure de fixation de la rémunération de l'avocat est gratuite.

2En cas de recours manifestement infondé, procédurier ou à tout autre égard abusif contre la décision fixant la rémunération de l'avocat, l'autorité de recours peut toutefois mettre les frais de la procédure à la charge du recourant.

3Il n'y a pas lieu à octroi de l'assistance pour la procédure de fixation de la rémunération de l'avocat.

 

5. Acomptes

Art. 36   L'avocat peut demander le versement d'acomptes en cours d'instance lorsque le mandat implique un engagement important et de longue durée.

 

CHAPITRE 6

Remboursement des prestations de l'Etat

Remboursement anticipé

Art. 37   Dès l'octroi de l'assistance, le département peut convenir avec le bénéficiaire du versement d'acomptes à valoir sur les prestations de l'Etat.

 

Convention

Art. 38   1A l'issue de la procédure, le département convient avec le bénéficiaire de l'assistance des modalités de paiement des frais mis à sa charge et du remboursement des prestations accordées par l'Etat au titre de l'assistance.

2Le département tient compte notamment des charges prises en considération pour l'octroi de l'assistance ainsi que de la situation personnelle et familiale du bénéficiaire. 

3Lorsque l'assistance a été accordée ou maintenue à tort, le département réclame immédiatement le remboursement des prestations versées indûment.

 

Exécution forcée

Art. 39   1A défaut d'entente avec le bénéficiaire ou lorsque celui-ci ne se tient pas à l'arrangement convenu, le département recouvre les prestations de l'Etat par voie d'exécution forcée.

2Le dispositif du jugement ou de la décision fixant les frais avancés par l'Etat, de même que la décision fixant la rémunération de l'avocat, dûment attestés, valent titre exécutoire en faveur de l'Etat, au sens de l'article 80 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP), du 11 avril 1889.

 

Prescription

Art. 40   Les créances de l'Etat résultant de l'assistance se prescrivent par dix ans dès l'entrée en force du jugement ou de la décision qui a mis fin à la cause. 

 

CHAPITRE 7

Procédure et voies de droit

Procédure

Art. 41   Sous réserve des dispositions particulières de la présente loi, la procédure est régie par la loi sur la procédure et la juridiction administratives (LPJA), du 27 juin 19793).

 

Recours

1. En matière d'octroi de l'assistance et de rémunération de l'avocat

Art. 42   1Les décisions en matière d'octroi de l'assistance, y compris la désignation d'un avocat chargé du mandat d'assistance, et de rémunération de l'avocat, sont susceptibles de recours au Tribunal administratif.

2Le département a qualité pour recourir.

 

2. En matière de remboursement des prestations de l'Etat

Art. 43   Les décisions du département sont susceptibles de recours au Tribunal administratif.

 

CHAPITRE 8

Causes instruites devant d'autres autorités

Effets de l'assistance

Art. 44   1Lorsque l'assistance est accordée pour une cause instruite par une autorité autre qu'une autorité judiciaire ou administrative cantonale, la désignation de l'avocat chargé du mandat d'assistance est de la compétence de l'autorité saisie de la cause. La rémunération de l'avocat est prise en charge par la collectivité dont relève l'autorité saisie de la cause. 

2Les dispositions de la présente loi s'appliquent par analogie à la collectivité concernée.

 

CHAPITRE 9

Disposition pénale

Obtention illicite de l'assistance

Art. 45   1Celui qui, intentionnellement, aura fait, oralement ou par écrit, une déclaration inexacte ou incomplète en vue d'obtenir ou de maintenir l'assistance, ou de faire obtenir ou maintenir à un tiers l'assistance, sera puni de l'amende.

2Le bénéficiaire qui, intentionnellement, aura omis de communiquer une modification des faits sur lesquels repose la décision d'octroi de l'assistance, ou la survenance de tout autre fait relatif aux conditions d'octroi de l'assistance, sera puni de l'amende.

 

CHAPITRE 10

Dispositions transitoires et finales

Dispositions transitoires

Art. 46   1La présente loi s'applique dès son entrée en vigueur aux requêtes d'assistance pendantes à cette date, ainsi qu'aux effets des décisions antérieures accordant l'assistance, sous réserve des alinéas 2 et 3.

2L'article 21 s'applique aux seules procédures de recours introduites après l'entrée en vigueur de la présente loi.

3La désignation d'un avocat chargé du mandat d'assistance ne peut toutefois être remise en question.

 

Abrogation et modification du droit en vigueur

Art. 47   L'abrogation et la modification du droit en vigueur sont réglées dans l'annexe. 

 

Référendum

Art. 48   La présente loi est soumise au référendum facultatif.

 

Promulgation

Art. 49   1Le Conseil d'Etat pourvoit, s'il y a lieu, à la promulgation et à l'exécution de la présente loi.

2Il fixe la date de son entrée en vigueur.

 

 

Loi promulguée par le Conseil d’Etat le 23 août 2006.

L’entrée en vigueur est fixée avec effet au 1er janvier 2007.

 

 

 

 

ANNEXE

 

Article 47

Abrogation et modification du droit en vigueur

I

La loi sur l'assistance judiciaire et administrative (LAJA), du 2 février 19994), est abrogée.

 

II

Les actes législatifs ci-après sont modifiés comme suit:

 

Loi d'introduction de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (LILSEE), du 12 novembre 19965)

 

Art. 226)

 

Loi sur la procédure et la juridiction administratives (LPJA), du 27 juin 19797)

Art. 13, al. 48)

Art. 27, al. 2, lettre h9)

Art. 4610)

 

Code de procédure pénale neuchâtelois (CPPN), du 19 avril 194511)

Art. 7d, al. 112)

Art. 53, al. 2, 3 (nouveau)13)

Art. 54, al. 3 et 414)

Art. 5815)

 

Loi d'introduction de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (LILAVI), du 23 juin 199716)

Art. 517)

 

 

 

Notes:

(*)        FO 2006 No 50

 

1)         RSN 101

 

2)         RS 281.1

 

3)         RSN 152.130

 

4)         FO 1999 N° 12

 

5)         RSN 132.02

 

6)         Texte inséré dans ladite L

 

7)         RSN 152.130

 

8)         Texte inséré dans ladite L

 

9)         Texte inséré dans ladite L

 

10)       Texte inséré dans ladite L

 

11)       RSN 322.0

 

12)       Texte inséré dans ledit code

 

13)       Texte inséré dans ledit code

 

14)       Texte inséré dans ledit code

 

15)       Texte inséré dans ledit code

 

16)       RSN 322.04

 

17)       Texte inséré dans ladite L