561.4

 

 

2

avril

2009

 

Concordat intercantonal[1]
sur la coopération assistée par ordinateur des cantons lors de l'élucidation des délits de violence (concordat ViCLAS)

(*)

 

 

 

La Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police (ci-après: CCDJP) approuve, en exécution des articles 56 et 57 de la Constitution fédérale, du 18 avril 1999[2], l'accord ou concordat intercantonal ci-après :

 

1. Dispositions générales

Objet et but

Article premier   1Le présent accord ou concordat intercantonal (ci-après: accord) a pour objet la lutte efficace contre la criminalité (en série) de caractère violent ou sexuel par la collaboration entre les cantons, impliquant en particulier:

a)  la création de la base légale permettant l'utilisation transcantonale de l'instrument d'analyse ViCLAS pour empêcher et élucider les délits contre l'intégrité physique et sexuelle et,  

b)  le regroupement et l'exploitation au niveau supracantonal de résultats d'enquêtes et de procédures pénales cantonaux.  

2L'accord règle les conditions auxquelles ViCLAS peut être utilisé par les cantons signataires ainsi que par la Principauté de Liechtenstein.

 

Définition

Art. 2   Le système ViCLAS (Violent Crime Linkage Analysis System) est un instrument d'analyse des actes violents et des délits sexuels, qui se base sur des résultats d'enquête existants et qui offre de nouvelles bases d'investigation (relation délit-auteur ou relation délit-délit). Il permet l’exploitation des informations spécifiques aux délits indépendamment de la langue.

 

Champ d'application

Art. 3   1Le système ViCLAS est utilisé dans des procédures contre des auteurs connus ou inconnus en lien avec des enquêtes locales, régionales, nationales ou internationales.  

2Sont saisis dans ViCLAS des types de comportement et/ou des circonstances qui indiquent ou qui sont en rapport avec des délits contre l'intégrité physique  ou sexuelle et tout autre délit pour motif sexuel, qui se prêtent à l'analyse et la recherche dans ViCLAS. Cela comprend en particulier:  

a)  les homicides (y compris les tentatives),

b)  les délits contre l'autodétermination sexuelle (y compris les tentatives et les délits poursuivis sur plainte),

c)  les disparitions de personne dans des circonstances laissant supposer l’existence d’un crime,

d)  les approches suspectes d’enfants et d’adolescents dans des circonstances laissant supposer l’existence d’un motif d’ordre violent ou sexuel,

e)  les enlèvements (sauf enlèvement d'enfants par leurs parents ou enlèvement de mineurs par le détenteur de l’autorité parentale),

f)   les maltraitances d'animaux au sens de l'article 26, alinéa 1, lettres a et b de la loi sur la protection des animaux (LPA), du 16 décembre 2005[3] (état au 1er septembre 2008), dans des circonstances laissant supposer l’existence d’un motif d’ordre violent ou sexuel.

 

2. Organisation, compétences

Principe

Art. 4   1Par l'exploitation de ViCLAS, seules des données existantes ressortant d’enquêtes policières communales ou cantonales sont traitées et analysées de manière transcantonale.

2Sont saisies dans ViCLAS de manière standard toutes les informations importantes pour le travail d'enquête et disponibles dans les domaines ci-après:

a)  indications quant aux auteurs et à leur vie privée ou professionnelle;

b)  indications quant aux victimes et à leur vie privée ou professionnelle;

c)  indications quant à la relation auteur-victime;

d)  indications quant au délit et à la manière de procéder des auteurs;

e)  indications quant aux lésions corporelles et aux causes de décès;

f)   indications quant aux lieux du délit;

g)  indications quant aux types d'armes et d'outils utilisés;

h)  indications quant aux véhicules qui sont en relation avec le délit et/ou l'auteur.

3L'alinéa 2 s'applique également à des données ressortant d'enquêtes policières mais qui n'ont pas ou pas encore fait l’objet d’un jugement devant un tribunal.

 

Organisation

Art. 5   1L'exploitation du système d'analyse ViCLAS est assurée par la police cantonale bernoise en tant qu’instance centrale et concessionnaire responsable de la Royal Canadian Mounted Police (RCMP).

2La centrale ViCLAS est assistée par cinq services extérieurs régionaux. Ces services sont assurés par un canton pour chaque concordat de police (actuellement les cantons de Fribourg, Soleure, Lucerne et St-Gall) ainsi que par la police cantonale ou municipale de Zurich. Ils sont responsables du traitement et de l'analyse des cas des cantons qui leur sont rattachés.

3Chaque canton désigne deux coordinateurs qui sont responsables de l'échange d'informations avec les services extérieurs et la centrale.

4La direction stratégique de ViCLAS est assurée par le comité directeur ViCLAS. En font partie le chef de la police judiciaire du canton de Berne (présidence) ainsi que les chefs des polices judiciaires des cantons assurant les cinq services extérieurs. Le comité directeur doit rendre compte de son activité à la Conférence des commandants des polices cantonales de Suisse. Cette dernière exerce la surveillance sur l'application de l'accord.

 

3. Exploitation et protection des données

Echange d'informations

Art. 6   1Les cantons signataires sont autorisés à échanger entre eux les données énumérées aux articles 3 et 4 et selon les principes de l'article 8, à les enregistrer dans un système central et à les exploiter électroniquement.

2Les parties à l’accord doivent transmettre toutes les données relevant de ViCLAS au service extérieur compétent au sens de l'article 5.

 

Autorisation d'exploitation

Art. 7   Le système de traitement des données est exploité par la police cantonale bernoise pour l'ensemble de la Suisse. L'exploitation du système d'analyse ViCLAS est réglée par l'autorisation d'exploitation du Conseil-exécutif du canton de Berne selon l'article. 52, alinéa 5, de la loi sur la police cantonale (LPol), du 8 juin 1997[4].

 

Enregistrement et gestion des données

Art. 8   1L'enregistrement physique des données ViCLAS est effectué exclusivement par la centrale.

2S'agissant de la gestion des données dans ViCLAS, les principes ci-après sont applicables:

a)  les services extérieurs peuvent modifier leurs propres données et ont le droit de consulter les données des autres services extérieurs ainsi que celles de la centrale;  

b)  la centrale a le droit de modifier l'ensemble des données contenues dans le système d’analyse ViCLAS;

c)  les suppressions sont effectuées uniquement par la centrale.

 

Responsabilité

Art. 9   La responsabilité du respect de la protection des données et la garantie de la sécurité des données incombent au commandant de la police cantonale bernoise. Les collaborateurs ViCLAS de la centrale et des services extérieurs sont en outre personnellement responsables du respect des exigences et des prescriptions de la protection des données.

 

Droit de consulter le dossier

Art. 10   1Lorsque une personne demande à être renseignée ou à consulter, selon la législation cantonale applicable, les données traitées par la police à son sujet, l'autorité de police cantonale compétente est astreinte à transmettre la demande en tant que demande partielle au service extérieur compétent si

a)  une indication quant à une mention dans ViCLAS ressort des données traitées ou  

b)  la personne qui dépose la demande l'exige.

2Il est permis d’adresser des demandes de renseignements et de consultation directement à un service extérieur ou à la centrale.

3Le service extérieur transmet toujours la demande à la centrale.

4La centrale traite la demande et renseigne le demandeur ou lui accorde le droit de consulter son dossier. La centrale doit tenir compte des éventuelles restrictions au droit d’être renseigné ou de consulter qui existent de la part des autorités de police cantonales compétentes.

 

Rectification de données

Art. 11   1Chaque personne a droit à la rectification ou la suppression des données qui la concernent et qui ont été saisies de manière erronée ou superflue dans ViCLAS.

2La centrale est responsable de la rectification des données.

 

Procédure et protection juridique

Art. 12   1Les demandes de renseignement et de rectification relatives à ViCLAS ainsi que toutes les autres prétentions relatives à la protection des données en relation avec le présent accord se basent, sauf dérogation prévue par le présent accord, en principe sur les dispositions de la loi cantonale bernoise sur la protection des données (LCPD), du 19 février 1986[5].

2L'autorité de surveillance de la protection des données du canton de Berne est compétente en tant qu'autorité de surveillance.

 

Suppression des données

Art. 13   1Les données saisies dans ViCLAS sont supprimées dans les délais ci-après:

a)  les données sont en principe conservées durant 40 ans dès leur saisie. Les données sont supprimées à l'expiration de ce délai ou suite au décès des personnes impliquées dans le délit;

b)  en cas de risques élevés de récidive et d'entente avec l'autorité de police concernée, l'autorité judiciaire compétente du canton concernée peut sur demande de la centrale prolonger ce délai par période de cinq ans;

c)  en cas de récidive, le délai court à partir du dernier délit saisi dans le système d'analyse ViCLAS;

d)  le délai est suspendu durant l'exécution d'une peine privative de liberté ou d'une mesure stationnaire;

e)  les données enregistrées concernant un auteur (présumé) doivent être supprimés d'office:

-    suite à un acquittement, en ce qui concerne les données relatives au fait en question et sous réserve de la lettre f, ou;  

-    dès que sont dissipés tous les soupçons à l'encontre d'une personne (présumée) impliquée;

f)   si l'acquittement ou la suspension de la procédure a été prononcé en raison de l’irresponsabilité de l'auteur, la suppression des données sera soumise aux principes des lettres a - d.

2S'agissant des données relatives aux victimes et en cas d'enregistrements en vertu de l'article 3, alinéa 2, lettre d, la centrale procède, sur demande et indépendamment des délais fixés, à un contrôle de l'utilité de ces données. Toutes les données qui ne sont pas nécessaires sont supprimées dans le système ViCLAS. Les données relatives aux victimes peuvent être anonymisées sur demande.

3Le droit cantonal désigne les autorités compétentes pour communiquer les données à supprimer et la suspension du délai durant l'exécution d'une peine privative de liberté ou d'une mesure.

 

4. Financement

Fixation des frais

Art. 14   1La police cantonale bernoise supporte tous les frais de personnel et d'infrastructure résultant de l'exploitation de la centrale.

2Les frais d'exploitation et d'investissement des services extérieurs sont supportés par les cantons rattachés à chacun des services extérieurs ou par le concordat de police auquel appartient le canton assurant le service extérieur correspondant.  

3Les frais de licences supplémentaires ainsi que les dépenses décidées par le comité directeur pour les mises à jour liées au système sont répartis entre les parties à l’accord proportionnellement au nombre d'habitants.

 

5. Dispositions finales

Adhésion et résiliation

Art. 15   1Chaque canton intéressé peut adhérer en tout temps à l'accord. L'adhésion est effective immédiatement.

2Chaque partie à l’accord peut résilier l’accord pour la fin d'une année civile moyennant un préavis de six mois. La résiliation n'a pas d'influence sur les données saisies jusque là.

3La demande d'adhésion ainsi que la résiliation doivent être adressées à la CCDPJ.

 

Exécution

Art. 16   1Les cantons édictent les directives nécessaires à l'exécution de l'accord.

2Les concordats de police désignent leurs services extérieurs respectifs selon l'article 5, alinéa 2.

 

Entrée en vigueur

Art. 17   1L'accord entre en vigueur dès que le canton de Berne ainsi que deux autres cantons au minimum y ont adhéré.

2Les modifications de l'accord nécessitent l'approbation de toutes les parties à l’accord.

 

Notification à la Confédération

Art. 18   Le secrétariat général de la Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police (CCDJP) informe la Chancellerie fédérale du présent accord. La procédure est fixée par l'article 27o OLOGA[6].

 

Principauté de Liechtenstein

Art. 19   La Principauté de Liechtenstein peut adhérer au présent accord sur la base de sa propre législation. Elle dispose des mêmes droits et obligations que les autres parties à l’accord.

 

Juridiction

Art. 20   1Une instance d’arbitrage est mise en place pour régler tous les problèmes litigieux qui pourraient surgir entre les parties à l’accord dans le cadre de l'application et de l'interprétation du présent accord.

2Le comité directeur de la CCDJP est l'instance d’arbitrage.

3Les dispositions du concordat sur l'arbitrage, du 27 mars 1969[7] sont applicables.

4L'instance d’arbitrage tranche définitivement.

5Une instance d’arbitrage indépendante peut être mise en place pour les cas particuliers.

 

Dispositions transitoires

Art. 21   1Le présent accord s'applique par analogie aux données saisies dans le système d'analyse depuis le début de l'exploitation opérationnelle de ViCLAS en mai 2003. Les données correspondantes restent enregistrées et peuvent être utilisées en tenant compte des principes figurant dans le présent accord.

2Une nouvelle saisie de données relatives à des événements selon l'article 3 qui ont eu lieu avant l'entrée en vigueur du présent accord est possible jusqu'en 1978 pour les homicides et jusqu'en 1993 pour les délits d'ordre sexuel, pour autant que l'importance de ces données pour ViCLAS le justifie et que la qualité des données soit suffisante.  

3Les données qui devraient déjà être supprimées selon le droit cantonal en vigueur ne doivent pas être saisies dans ViCLAS.

4Les données qui ont été saisies dans ViCLAS avant l'entrée en vigueur du présent accord doivent être supprimées si elles ne pourraient être saisies à nouveau selon les principes fixés par le présent accord.

5Les données relatives à des événements selon l'art. 3 qui ont eu lieu avant l'entrée en vigueur du présent accord ne peuvent être saisies que si elles ne sont pas contraires aux principes fixés par le présent accord.

 

 

 

 

 

 

 



[1]     Adhésion du Canton de Neuchâtel par D du 24 janvier 2012 (FO 2012 N° 6), promulgué le 14 mars 2012 (FO 2012 N° 11) avec effet au 1er avril 2012

(*) FO 2012 No 6

 

[2]     RS 101

[3]     RS 455

[4]        RSB 551.5

[5] RSB 152.04

[6]     RS 172.010.1

[7]     RSB 279.2